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Actulire: Gen d'Hiroshima et crise nucléaire au Japon
Nous inaugurons aujourd'hui une nouvelle catégorie de billets: actulire.
Nos connaissances comme nos expériences imprègnent évidemment notre perception de l'actualité. Nos lectures influencent elles aussi la façon dont nous déchiffrons un événement. Nous vous présentons ici une oeuvre, pas nécessairement connue, ni récente, mais dont la lecture permet d'apprécier différemment un sujet d'actualité.
En guise d'étrenne, une oeuvre pour vous faire voir autrement la crise nucléaire au Japon: Gen d'Hiroshima, de Keiji Nakazawa.
Le vendredi 11 mars 2011, le Japon a connu le plus important séisme de son histoire, entraînant rapidement un tsunami. Depuis, des tremblements de terre en série frappent l'archipel. Ces bouleversements successifs ont fragilisé plusieurs centrales nucléaires nippones. À Fukushima Daiichi, la situation est telle qu'on envisage présentement que survienne l'un des plus graves accidents de l'histoire du nucléaire civil. Les circonstances sont si inquiétantes qu'elles ont incité certains pays à interrompre l'activité de leurs propres réacteurs nucléaires, voire à suspendre de simples projets de construction de centrales.
Dans ce contexte, un minimum de connaissances en histoire contemporaine amène naturellement à penser à Hiroshima et Nagasaki.
Hiroshima Peace Memorial Park, par karma-police, sous licence CC de type BY-NC-ND 2.0.
Depuis que les humains «maîtrisent» l'énergie nucléaire, plusieurs accidents sont survenus, dont le plus grave est sans conteste la catastrophe de Tchernobyl. Plusieurs bombardements en des lieux isolés ont servi à des fins d'expérimentation. Les bombardements atomiques d'Hiroshima et de Nagasaki sont par contre les seuls de l'histoire à avoir servi en contexte de guerre.
Les centaines de milliers de morts causées par ces bombardements, les souffrances manifestes des survivants n'ont apparemment pas dissuadé les Japonais d'exploiter éventuellement à leur tour le nucléaire. C'est un constat troublant, que la lecture de Gen d'Hiroshima peut peut-être éclairer. Un peu.
Gen d'Hiroshima, ou Hadashi no Gen, est l'oeuvre de Keiji Nakazawa. Il s'agit d'un manga, une bande dessinée japonaise. Gen d'Hiroshima compte dix tomes, publiés à partir de 1973. L'ensemble de la série traduite en français a été publiée à partir de 2003.
Le récit de Nakazawa, en partie autobiographique, dépeint le contexte dans lequel le bombardement est survenu à Hiroshima, l'événement en lui-même, puis, durant neuf tomes, les efforts du héros pour survivre dans un monde certainement post-apocalyptique.
Nakazawa décrit, ou plutôt dénonce la guerre, la culture militariste et impérialiste du Japon pas encore vaincu, l'horreur, les multiples horreurs de l'événement lui-même, mais aussi la dureté de la société d'après-guerre à Hiroshima, la difficulté de simplement survivre dans un tel contexte, les machinations entre certaines élites et l'occupant américain, la censure dont souffrent les survivants du bombardement qui tentent de témoigner de ce qu'ils ont subi, les abus dont sont victimes les plus faibles, le désintérêt voire le rejet des Japonais qui n'ont pas connu les bombardements fatidiques pour ceux-ci et leurs survivants...
Par moment, le portrait que peint Nakazawa de la société japonaise des années 40 et 50 en pleine crise contraste avec celui qui est fait de celle d'aujourd'hui, à nouveau en crise. Changement d'époque ou généralisations hâtives des médias? La description de Nakazawa, malgré le traitement parfois caricatural, semble plus nuancée, et donc d'autant plus convaincante. Peut-être plus disciplinés que nous, Occidentaux, les Japonais n'en savent pas moins être égoïstes et profiteurs à leur heure. Le silence imposé aux hibakusha sur leur expérience traumatisante, bien qu'il n'ait pas résisté jusqu'à nos jours (à preuve, la parution de Gen d'Hiroshima dès 1973), ainsi que la discrimination qu'ils ont subi, expliquent quand même peut-être en partie une certaine ignorance et donc que les Japonnais n'aient pas été plus craintifs face à l'utilisation du nucléaire chez eux. Enfin, malgré certaines divergences, un élément revient aussi bien dans Gen d'Hiroshima que dans les médias ces temps-ci: la résistance, l'endurance, la ténacité, en somme la résilience des Japonais. Gen s'accroche ainsi tout au long du récit aux paroles de son père: «Le blé bourgeonne en hiver et on le piétine maintes et maintes fois. Mais il s'enracine solidement et il pousse bien droit malgré le gel et les tempêtes de neige. Sois aussi fort que lui.»
Je vous recommande sans réserve Gen d'Hiroshima. Un récit bouleversant, qui nous en apprend sur une tragédie dont on ignore trop souvent la portée, mais qui n'est toutefois pas exempt d'épisodes drôles ou plus heureux. Une belle façon aussi de découvrir le manga!
Pour en savoir plus sur Gen d'Hiroshima et Keiji Nakazawa
- Gen d'Hiroshima sur Wikipedia
- Entretien avec Keiji Nakazawa, l’auteur de «Gen d'Hiroshima» (propos recueillis par Didier Pasamonik) - 07.2003
- Barefoot Gen, the Atomic Bomb and I: The Hiroshima Legacy: Nakazawa Keiji interviewed by Asai Motofumi, Translated by Richard H. Minear - 08.2007
Pour en savoir plus sur la crise actuelle au Japon
Ressources québécoises:
Autres ressources francophones:
- Le Monde - Japon
- Le Nouvel Observateur - [Heure par heure] Japon : après le séisme et le tsunami, la menace nucléaire
- Libération - Japon, la catastrophe
- Office national du tourisme japonais
- Office national du tourisme japonais Canada
Autres ressources:
- Central Intelligence Agency (CIA) - The World Factbook - Japan
- New York Times - Japan - Earthquake and Tsunami (2011)
Aerial of Sendai, Japan, following earthquake, par Official U.S. Navy Imagery, sous licence CC de type BY 2.0.
vendredi 19 novembre 2010
Réponse à l'article de La Presse: Profession: bibliothécaire 6/6
«I ran across a book recently which suggested that the peace and prosperity of a culture was solely related to how many librarians it contained. Possibly a slight overstatement. But a culture that doesn't value it's librarians doesn't value ideas and without ideas, well, where are we?»